PARIS – Le réveil du volcan Mauna Loa, en 2022 à Hawaï, a été déclenché par la migration de magma entre deux réservoirs sous sa surface. Une découverte qui pourrait permettre de mieux prévoir une future éruption.
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Le monde compte plus de 1500 volcans actifs et plus de 29 millions de personnes vivent à moins de 10 km de l’un d’entre eux, selon une étude publiée en 2017. Du Vésuve (Italie) à la Montagne Pelée en Martinique (France), nombre de ces volcans sont sous surveillance constante. Mais distinguer les périodes d’agitation intermittentes d’un volcan de celles précédant directement une éruption est un défi majeur.
Les volcanologues ne sont pour le moment en mesure de prévoir une éruption possiblement dévastatrice que quelques jours voire quelques heures à l’avance. C’est le cas pour le Mauna Loa, le plus grand volcan actif de la planète, qui couvre la moitié de l’île américaine d’Hawaï dans le Pacifique, et a connu 34 éruptions depuis 1843.
La dernière a débuté le 27 novembre 2022. Pendant 13 jours, le volcan a craché des fontaines de lave jusqu’à 60 m de haut, charrié d’impressionnantes coulées de roche en fusion et émis des tonnes de gaz volcanique, sans faire de victime. Avant cette éruption, le Mauna Loa avait connu 38 années de repos, entrecoupées de plusieurs périodes d’agitation, avec une forte activité sismique.
“Les niveaux d’alerte volcanique (…) sont passés plusieurs fois de ‘Normal/Vert’ à ‘Surveillance/Jaune’ pendant cette période”, mais “il était difficile de savoir si une agitation donnée conduirait à une éruption imminente”, rappellent les auteurs d’une étude publiée mardi dans Nature.
Ces volcanologues ont étudié des échantillons de lave collectés après l’éruption grâce à une technique appelée “chronométrie de diffusion”. Elle permet d’estimer le temps qui s’est écoulé depuis qu’un minéral – comme l’olivine ou l’enstatite – a été modifié ou déplacé dans le magma.
“Tuyauterie” du volcan
Leurs résultats montrent qu’au cours des deux mois ayant précédé l’éruption, un large volume de magma a migré depuis 3-5 km jusqu’à 1-2 km sous la caldeira – le large cratère formé par l’éruption et l’effondrement d’un volcan. Cela a augmenté la pression sur le réservoir de magma peu profond qui s’y trouvait, jusqu’à provoquer l’éruption.
Des signes de cette migration du magma vers des couches superficielles avaient été enregistrés par certains outils de surveillance du volcan, qui mesurent en continu l’activité sismique ou la déformation du sol.
“L’agitation pré-éruptive indiquait clairement que le magma se déplaçait vers l’intérieur du volcan deux mois avant l’éruption. Notre étude a permis de préciser ‘d’où et vers où’ ce magma se déplaçait”, explique à l’AFP Kendra Lynn, volcanologue à l’Institut américain de géophysique (USGS), qui a dirigé l’étude.
Comprendre le rythme de transport du magma dans la “tuyauterie” interne du volcan, “apporte de la clarté aux interprétations des données de surveillance en temps réel”, note la chercheuse.
Identifier des schémas
En examinant une série d’éruptions dans l’histoire d’un volcan, cette technique “permet également d’identifier des schémas qui pourraient indiquer des déclencheurs communs”, ajoute-t-elle. Son équipe travaille sur les éruptions du Mauna Loa au cours des 200 dernières années, avec l'”objectif ultime” de “mieux comprendre la phase précédant la prochaine éruption”.
Ces déclencheurs sont-ils propres à chaque volcan ou existe-t-il des processus communs? “Cela reste à démontrer”, car pour le moment, seuls 9% des volcans ayant connu une éruption depuis l’an 1500 ont été étudiés de cette manière.
“Avec un nombre suffisant d’études dans divers systèmes, je pense qu’il serait possible de commencer à classer les volcans en fonction du rythme de transport de leur magma. C’est une voie passionnante qui pourrait faire progresser notre compréhension des volcans dans le monde”, estime Mme Lynn.
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Le 12 novembre 2024. Sources : Keystone-ATS. Crédits photos: Adobe Stock, Pixabay ou Pharmanetis Sàrl (Creapharma.ch).