SAO PAULO – Qu’on le veuille ou non Sao Paulo est la plus grande ville (presque 12 millions d’habitants sans la banlieue) de l’Occident chrétien, en excluant donc le Japon. Voici une histoire qui fait froid dans le dos, dans cette métropole qui compte beaucoup de milliardaires et plus de 50 énormes centres commerciaux souvent très luxueux. Ville incroyable de richesse mais aussi de grande pauvreté et surtout de misère sociale (drogue, prostitution, ultra-violence, vols en tout genre).
Italo, gamin pauvre d’une des très nombreuses favelas de la ville est mort début juin d’une balle dans la tête, tué par un policier. L’histoire fait étrangement depuis des jours la une des grands médias brésiliens (Folha de S.Paulo, Veja, Record…) malgré les environ 150 meurtres commis chaque jour dans ce pays, qui dépasse de loin les Etats-Unis dans ce décompte morbide. Comme souvent les médias voient dans certaines histoires une émotion à transmettre, peut-être pour une prise de conscience ou tout simplement faire de l’audience.
Italo est né en 2005 de 2 parents criminels, son père est toujours en prison pour trafic de drogue condamné à 18 ans et sa mère âgée actuellement de 29 ans a un casier judiciaire loin d’être vierge. Le 2 juin, le jeune Italo de 10 ans vole une voiture avec un complice dans un quartier riche de Sao Paulo, appelé Morumbi. La police les prend en fuite, refusant de s’arrêter on dans l’incapacité de le faire, un des 2 policiers tire et tue d’une balle dans la tête Italo. Selon la police, Italo avait tiré sur eux. Le magazine conservateur Veja dans son édition de cette semaine émet déjà une critique dans la formation des policiers, tirer dans la tête n’est probablement pas une bonne idée. De plus, Veja mentionne des incohérences dans les témoignages, notamment de l’ami (complice) d’Italo. Il a en premier affirmé aux policiers qu’il avait tiré sur la police, puis ensuite a dit le contraire, qu’ils n’avaient pas d’arme.
Destin tragique
Italo pris en charge jusqu’à 8 ans par sa grand-mère a eu dans sa jeune vie un triste destin. Sa mère l’a plus ou moins abandonné ou en tout cas à de nombreux moments, il a vécu dans plus de 20 foyers différents pour enfant, vivait souvent sous les ponts et n’allait plus à l’école (ou très peu). Il était hyperactif et impliqué dans beaucoup de bagarres dans les foyers pour enfant. Ce n’était probablement pas un ange (même si à la TV sa maman semblait plus ou moins l’affirmer), mais ce genre d’histoire à quelques semaines des Jeux Olympiques ne peut que nous attrister d’avoir autant de malchance en seulement 10 ans.
La vie n’est souvent qu’une question de chance, d’opportunité ou de destin comme l’ont montré beaucoup d’études scientifiques, et si nous avions eu la vie d’Italo ?
C’est pourquoi beaucoup d’intellectuels travaillent depuis longtemps déjà sur le concept de l’égalité des chances et d’opportunités pour chacun. Cette histoire est là pour nous rappeler tout le travail qu’il reste à parcourir pour un monde meilleur.
Le 15 juin 2016. Par Xavier Gruffat, dipl. EPFZ/MBA. XG vit actuellement à Sao Paulo mais a vécu dans plusieurs villes de Suisse y compris en Suisse allemande, aux Etats-Unis (Californie) et au Brésil. Il est spécialiste de la culture occidentale suite à ses nombreuses lectures (The Wall Street Journal, NYT, The Economist, Veja, Folha, NZZ, NPR, France 5, France Info, etc).
Sources: Folha de S.Paulo, Veja